Lola tournait clairement en rond. Elle avait passé plusieurs nuits à pleurer de tout son saoul, mais Rose sa compagne de chambre avant plus ou moins réussit à lui changer les idées. Désormais, elle essayait de penser à autre chose en faisant l’imbécile dans les studios. Elle se cachait et faisait peur aux autres, elle avait passé une journée entière dans le coin dessins, à regarder avec minutie chaque maquettes. Elle avait aussi observé avec beaucoup d’attention, nombre de décors.
Il fallait se rendre à l’évidence, la jolie blonde s’ennuyait ferme et se sentait un peu seule. Pas l’ombre d’un visage connu à l’horizon et la plupart de ces compagnons d’infortune étaient venus accompagnés…
Elle passait aussi beaucoup de temps avec sa baguette dans les mains. Elle avait pris celle d’Hermione Granger au magasin magique et n’allait nul part sans elle. Le pourquoi et comment de la chose restaient vraiment mystérieux et pourtant cette jeune femme qui n’avait jamais pris le temps de comprendre un traître mot de cette histoire, se trouvait à maîtriser la magie de manière vraiment correcte. Si elle agitait sa baguette en pensant à ce qu’elle voulait, la chose se réalisait souvent (lorsque la chose était possible, mais ça elle ne le savait pas). Rose s’essayait à lui donner des cours et Lola s’amusait vraiment beaucoup à apprendre des sortilèges et à manier la baguette.

Elle avait également décidé de lire les fameux bouquins à l’origine de tout ce bazar. Quitte à être enfermé dans les lieux de tournages autant comprendre l’histoire ! Elle avait donc emprunté un des livres Harry Potter en vente dans le magasin de souvenirs et cherchait désormais un endroit où se poser pour lire. Elle aurait très bien pu rentrer « chez elle », mais elle avait en tête de peut-être se faire de nouveaux amis.
Elle traversa les premiers décors situés dans le grand bâtiment, fit un signe de tête au train rouge où certaines personnes dormaient la nuit. Quelle drôle d’idée d’ailleurs, personne n’avait idée de dormir sur des banquettes alors que de vrais lits étaient à la disposition de tous partout dans les studios. Lola hocha la tête en songeant que tout de même certaines personnes réfléchissaient de manière très étrange. Elle arriva dans le restaurant, bar, pub tout ce que vous voulez en fait, le ButterBeer. Cet endroit était toujours rempli de monde d’habitude et il fallait dire que l’ambiance, le décor y étaient plutôt sympa. Lola y passait pas mal de temps puisqu’elle n’avait qu’à sortir de chez elle et traverser la cour pour y arriver. Mais cette fois-ci l’endroit était désert et elle décida de s’y installer. Seules quelques personnes disséminés dans la salle bavardait à voix basses ou s’occupaient comme le faisait elle-même. Rester enfermer dans un même endroit n’est pas le propre de l’homme, il fallait le dire et elle craignait de devenir folle à tourner en rond de la sorte. Elle s’assit à la première table libre qu’elle trouva.

Une soixantaine de pages plus loin, elle fut tirée de sa lecture par une voix masculine qui semblait réciter un texte en parlant très vite. De sa place, elle n’entendait qu’un baragouinage indistinct, mais cela suffit à éveiller sa curiosité. Elle ferma le livre en tâchant de se souvenir de sa page et observa le jeune homme en question. Elle ne le voyait que de trois quart, mais elle aurait parié qu’il était plutôt mignon. A un moment, il dû sentir son regard posé sur lui et se détourna vers elle. Aussitôt Lola fit mine d’être plongée dans ses pensées et rouvrit le livre comme si elle venait de trouver la solution à ses problèmes. Elle le garda ouvert et continua de le fixer.
Elle l’avait déjà vu puisqu’elle s’était littéralement jetée sur lui le premier jour de leur enfermement. Il avait dû la prendre pour une folle d’ailleurs. Quelques minutes plus tard, il finit par se lever et se dirigea vers le comptoir pour commander quelque chose. Lola, n’hésita pas une seconde et en profita pour venir lire ce qu’il avait laissé traîner sur la table.

Les mots étaient justes, touchant, elle se surprit à penser qu’il écrivait assez bien. Elle lut même le début à voix haute, jouant avec les mots au son de sa voix. Elle en aurait presque oublié que ces notes ne lui appartenaient pas...

Elle récite les mots, appuyant sur certaines syllabes, en laissant partir d’autres bien plus vite. Lola ne sait pas rapper, elle chante plutôt bien, mais surtout elle sait jouer la comédie, elle sait mettre les intentions demandées là où il faut, quand il faut. Et la personne qui a écrit ça, elle ne peut le nier, a du talent. Elle aurait pu noter quelques répétitions, mais ça aurait été chipoter pour pas grand-chose. Son texte recelait une poésie, des sentiments profondément humains et il était agréable en bouche. L’auteur avait l’esprit torturé, c’était évident. Sa plume était mélancolique, presque pessimiste, le monde qu’il décrivait paraissait sans espoir et Lola s’était tout à coup sentie vidée de toute énergie, malgré les ondes positives qui emplissaient l’espace. Elle répétait ses derniers mots, les tournant à sa manière, tâchant d’y mettre une touche d’espoir lorsque un bruit à côté d’elle la sortit de sa réflexion. Elle sursauta, se détournant vers la provenance du bruit. Le rouge lui monta aux joues lorsqu’elle se rendit compte que c’était lui. Pourtant, elle aurait dû le prévoir, elle le savait même très bien, qu’il finirait pas revenir à sa place et par la surprendre. Mais passé l’excitation de la découverte, elle s’était laissée embarquée par sa prose. Maintenant qu’il se tenait à côté d’elle, Lola se sentait vraiment mal d’être venue lire ce qui ne la regardait pas.

Malgré tout, elle l’observa, ne lâchant pas pour autant le cahier qu’elle tenait fermement entre ses mains. Il n’avait pas l’air fâché, au contraire, un sourire illuminait son visage et c’était plus de la curiosité qu’elle pouvait lire sur ses traits. Elle haussa un sourcil lorsqu’il lui énonça le titre. Elle ne semblait pas s’être trompée quant à l’humeur du jeune homme. Le seul être humain dans les environs ? « C’est un peu orgueilleux comme idée non ? » Il n’y avait aucune agressivité dans sa voix, juste un questionnement. Elle replongea son regard sur le texte en s’asseyant à la table. Si cela pouvait être prit comme une intrusion, Lola espérait simplement que ce ne serait pas le cas. Elle voulait discuter, s’intéresser à ce garçon sur qui elle s’était jetée, paniquée lors de la découverte des baguettes. Il l’intriguait, un membre du staff, qui semblait bien seul et surtout qui n’avait pas l’air de s’intéresser plus que ça à tout ce qui pouvait l’entourer dans les studios. Elle aurait même parié qu’il faisait parti des gens à vouloir à tout prix s’en aller. Elle même n’aurait pas été contre, mais son rapport à la magie lui faisait sentir qu’elle avait peut-être des choses à faire ici.
« Pourquoi est-ce que le texte me parait sombre comme ça alors que le message lui est positif ? » Elle leva un œil interrogateur sur lui, la manière dont étaient tournées les phrases, tout transpirait le désespoir alors que les mots employaient appelaient à la libération, elle avait toujours été fascinée par ces poètes torturés. « C’est une chanson ? Un rap peut-être ? » Une courte pause, un léger silence. « J’aime bien en tous cas. » Elle lui sourit franchement et lui tendit la main. « Moi c’est Lola, la dernière fois on a pas vraiment eu le temps d’être présentés... »

Elle se gigota rapidement pour extraire de son dos sa baguette qu’elle coinçait dans son soutien-gorge pour la poser sur la table, sans prendre compte de la réaction que cela pouvait tirer à l’autre.